Si Monaco m’était chanté
#57 - Juillet / Septembre 2018 - Patrimoine

Si Monaco m’était chanté

« Monte-Carlo, Monte-Carlo, tu es le paradis dont rêvent les Claudines, les Don Carlo… », peut-être avez-vous déjà entendu les notes de ce vieux tango fredonné dans la rue par une âme nostalgique? 

Terre d’inspiration de nombreux artistes, Monaco n’a cessé de faire rêver les poètes qui ont chanté son histoire. Musique ! 

Revivre les fêtes populaires en musique

S’il est une des premières musiques qui marque la vie monégasque, c’est bien entendu son hymne national. L’entrainant chant patriotique composé par Théophile Bellando de Castro dans les années 1840 fut réorchestré à plusieurs reprises depuis. Les paroles écrites en monégasque par Louis Notari en 1928, traduisent la stabilité et la liberté d’une petite mais forte nation « Depuis toujours, le même pavillon /Flotte joyeusement au vent de notre pays / Depuis toujours les couleurs rouge et blanche / Constituent le symbole de notre liberté ». 

Les grands moments d’histoire, comme les plus belles fêtes populaires s’animent aussi sur des notes cuivrées. Dès le premier festin monégasque, au Parc Princesse Antoinette, le 14 juin 1931, les chants folkloriques rythment le milieu d’après-midi. Des Festin Munegascu au Cavagnëtu, on y retrouve l’empreinte musicale de grands auteurs et compositeurs monégasques qui ne cesseront d’accompagner ces instants joviaux appartenant à la mémoire du pays : Marc César Scotto, Henri Aimé Crovetto, Louis Notari, Marc Curti… La musique éveille du passé les goûts de l’époque, l’insouciance et la joie, et leurs paroles font revivre ce Monaco d’antan laissant de merveilleux souvenirs à ceux qui l’ont connu. 

Monte-Carlo fait tourner les têtes et les ritournelles ! 

À côté du Monaco populaire, un autre monde émerge des fabuleux tableaux musicaux. Celui du faste du Casino de Monte-Carlo, de la douceur de vivre en Méditerranée, des soirées d’été des années folles, faites d’insouciance et d’exubérance. Cet univers mondain devient le leitmotiv de nombreuses chansons. Elles sont le témoignage d’une autre atmosphère qui côtoie ces fêtes folkloriques sans jamais se croiser. Destination de rêve, les chansons sur Monte-Carlo se fredonnent de la Côte d’Azur à la capitale. Dans le Paris des années 30, l’opérette de Sacha Guitry Florestan Ier, Prince de Monaco dépeint une vie douce et légère à l’image de son titre phare Amusez-vous ou Midi, merveilleux paradis. L’évocation du mythe Monte-Carlo, en 1939, dans la période troublée de la guerre, permettra à Tino Rossi d’apporter un peu de douceur à son public avec son nouveau succès De Nice à Monte-Carlo, composé par Vincent Scotto : « De Nice à Monte-Carlo, c’est l’éternelle folie, c’est l’éternel renouveau. Parmi les mimosas, les glycines, les lilas, les orangers en fleurs, nous vivrons la minute divine du bonheur »…

D’autres évoqueront les excès d’un pays où l’on peut se perdre entre le tourbillon des jeux, du faste et des fêtes. La Dame de Monte-Carlo, superbe texte écrit par la plume fine et délicate de Jean Cocteau et interprété par la voix grave et mélancolique de Marianne Oswald peint le portrait d’une bourgeoise flambeuse que l’artiste et Marianne ont longtemps observé lors d’un séjour en Principauté : « Elle les croisait, toujours à la même heure, en se rendant au casino et elle n’en finissait pas d’avoir « une tête à se foutre à l’eau » », précise l’historien du jazz et écrivain Daniel Nevers. 

Avec l’évolution des moeurs, les peintures de la vie monégasque en chanson changent de rythme ! Les années 50 sont marquées par le début du jazz et des music-hall. Avec passion et singularité, le grand chef d’orchestre Aimé Barelli enchante les soirées du Casino du Sporting Club de Monaco, et forme les futures vedettes de la variété dont une jeune et ambitieuse tête blonde, Claude François. Ses musiciens accompagneront les grands noms du jazz de Frank Sinatra à Miles Davis. La femme du chef d’orchestre, Lucienne Delyle, très connue grâce à l’un de ses succès Les amants de Saint Jean ne peut s’empêcher d’évoquer dans sa chanson Monte-Carlo, sa ville comme « un printemps regardant la mer, une bague sur les vagues, un saphir dans un coeur ouvert ». Un titre qui sera notamment repris par Joséphine Baker lors de son fabuleux spectacle pour l’ouverture du tout nouveau Sporting d’été en 1974. 

Monaco en haut de l’affiche

Si Monaco est chanté, Monaco chante aussi ! Avec les sixties, un concours européen de chanson voit le jour en 1956 : l’Eurovision. Monaco y participe pour la première fois en 1959 avec le titre Mon Ami Pierrot, et ne ratera aucune des vingt et une éditions suivantes. L’idole des yé-yé, Françoise Hardy, interprète pour Monaco L’amour s’en va en 1963 tandis qu’en 1967, la fille d’Aimé Barelli, la chanteuse Minouche Barelli, concourt avec une composition de Serge Gainsbourg Boum Badaboum. Mais il faudra patienter jusqu’en 1971, pour que Séverine et sa chanson Un banc, un arbre, une rue offre sa première et unique victoire à la Principauté. Monaco en chanson, ce sont aussi ses artistes monégasques qui ont sans cesse enrichi son répertoire musical. De Léo Ferré à Richard Lord, leur succès ont contribué au rayonnement culturel et artistique de la Principauté la projetant au devant de la scène n

Le saviez-vous ? 

Monaco inspire parfois des oeuvres les plus inattendues ! En 1931, le film allemand Capitaine Craddock a pour toile de fond Monte-Carlo. De nombreux titres extraits de cette comédie musicale détonnante dépeignent les jeux, et le Casino de Monte-Carlo. Si le titre semble vous parler… Hergé s’inspirera de ce film pour créer l’acolyte de Tintin, le Capitaine Haddock. 

Cet article a été écrit en collaboration avec Dominique Bon, responsable du Fonds Régional, et grâce au précieux témoignage de Richard Projetti. 

 

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